W. – A. MOZART (1756-1791)
Quatuor pour piano et cordes en sol mineur, K. 478
Julien Churin, violon
Cédric Lebonnois, alto
Genevieve Koerver, violoncelle
Jerome Bloch, piano
Allegro – Andante – Rondo
Les deux seuls quatuors avec piano de Mozart furent composés en 1785 pour le premier (sol mineur) et en 1786 pour le second.
Ils sont contemporains des Noces de Figaro.
Il s’agit historiquement des premières pièces majeures pour ce type de formation de chambre : piano, violon, alto et violoncelle.
Cette formation restera néanmoins rare par la suite (les plus célèbres étant ceux de Brahms, Schumann, Dvorak et Fauré).
Ils furent commandés par l’éditeur Hoffmeister (Vienne) et devaient être plus nombreux initialement (trois selon Nissen) mais le peu de succès (lié à sa difficulté technique) rencontré par le premier quatuor en sol mineur (K. 478, octobre 1785), fit que Mozart renonça à poursuivre dans cette voie. Après la résiliation du contrat avec Hoffmeister qui considérait l’œuvre comme « trop difficile pour son public » (toujours selon Nissen), le second fut publié (1787) par Artaria qui le jugea manifestement vendable.
Dans ces deux œuvres, le piano a une partie très brillante et concertante qui l’apparente aux concertos pour piano contemporains viennois des dernières années de la vie de Mozart.
Le quatuor en sol mineur, le plus souvent joué, est représentatif et typique de l’atmosphère préromantique de la période « Sturm und Drang » – « Tempête et Passion » -, dans l’esprit tragique des Souffrances du jeune Werther de Goethe, inspiré également par Rousseau et Shakespeare, qui met au cœur des récits littéraires, du théâtre, mais aussi de la musique et de la peinture, la révolte de l’individu passionné, épris de liberté, et déjà révolutionnaire, dans une Allemagne encore absolutiste.
Citons Jean et Brigitte Massin à propos de ce quatuor : « C’est pour la dernière fois ici que Mozart inaugure un nouveau genre dans sa production musicale : celui du quatuor avec piano. Genre qui est absent de toute l’œuvre de Joseph Haydn, et que les autres contemporains ne cultivent guère ; tout au plus Mozart doit-il se souvenir des deux quatuors avec clavecin que Schobert, l’un des grands initiateurs de son enfance, a composés voici plus de vingt ans. On comprend ce qui peut le tenter dans cette formule quasi neuve : essayer la fusion du quatuor et du concerto (c’est nous qui soulignons, Barock-sur-Loire), au lendemain des quatuors à Haydn, et des trois grands concertos de l’hiver précédent. Dix-huit mois avant, une recherche similaire avait abouti au quintette pour piano et vents en mi bémol K. 452 (…). A présent Mozart envisage une rupture plus complète encore avec les règles élémentaires de la galanterie : faire dialoguer un violon et un piano sans hégémonie avec deux autres instruments ; faire aboutir, sur le plan le plus intime de la musique de chambre le dialogue concertant du social et de l’individuel (…) Pour quelques mois, Mozart en est encore au bref moment de sa vie où l’apogée de ses succès sociaux, l’équilibre relatif de sa vie privée, la maturité de son art et les apports intellectuels de son entrée dans la Franc-Maçonnerie lui permettent à la fois d’exprimer sans précaution les conflits humains dont se nourrit son œuvre et de croire que ces conflits ne sont pas voués à l’inévitable issue d’un tragique sans espoir ». (Mozart, Fayart, 1985).